La vie politique et sociale du pays est assez agitée. De partout des courants de protestation et de contestation
.L’IRA et la question de l’esclavage,
Touche pas à ma nationalité et le probléme
de l’enrolement,L’assemmblée nationale et ses joutes houleuses.
Quelle lecture faut-il se faire
de cette recrudescence de la fibre contestataire ? Peut-on y voir
l’expression d’un dynamisme démocratique où les libertés d’expression et
d’association boostent les ardeurs revendicatives et offrent des tribunes
d’expression plurielle qu’un environnement social sclérosé a du mal à offrir ?
Ou au contraire faut-il y déceler l’empreinte d’une époque où le brassage des
peuples à la faveur du « paradigme médiatique »crée le culte des
comparaisons qui fait naitre ici comme
ailleurs une conscience du refus assez
marquée ?
Les hommes ressemblent à leur époque et notre époque est une
époque de contestation. Le quotient d’indignation est assez élevé de nos
jours parce que nous disposons de
meilleurs outils pour jauger nos réalités, mesurer nos performances et
apprécier nos vécus. Nos schémas mentaux deviennent de plus en plus critiques
et donc moins permissifs aux traditionnels discours démagogiques qui agissaient
jusqu’ici comme soupape de stabilisation
sociale. La réalité devient du coup crue, nue. Les injustices remontent en
surface et apparaissent au grand jour. Il suffit juste alors d’ouvrir les yeux ;
de regarder autour de soi, juste autour pour constater qu’en réalité en
Mauritanie ce n’est pas parce que « nous
venons de loin » mais plutôt parce que nous
étions allés loin, trop loin
dans l’inégalité et la discrimination raciale .La fracture sociale chez nous
est si profonde, si criarde, si injuste .Sa première expression est d’abord et
surtout raciale avant d’être autre
chose. Peu importe le nom que nous donnerons à ces « ordres » ; peu importe leur provenance. Le fait
est que quand dans un pays certains ont
plus d’opportunités que d’autres, plus de moyens que d’autres, plus de pouvoirs
que d’autres, plus d’influence que d’autres, plus de représentativité que
d’autres du simple fait de la couleur de leur peau, Ce serait puéril et
malveillant de réduire cette injustice à une simple question de vocabulaire, un simple contenant lexical. Appelez
–le racisme, discrimination, esclavage, séquelles ou survivances !qu’importe !
Le fait est que les citoyens ne sont pas égaux de Fait, de visu !
Ici, les positions et les postures affichent des
relents colorés .la géographie est
une sociologie la sociologie, une économie
et l’économie une politique. Le tout formaté dans un style quasi normatif où
toute vision contraire apparait comme une hérésie .Ne ne pas s’offusquer de la réalité
mais s’indigner de l’appellation qui lui est faite ! C’est ridicule, immorale et bassement provocateur.
Que cette injustice soit l’œuvre de politique actuelle ou
l’émanation de pratiques et politiques anciennes n’enlève en rien de sa perversité
.Car un effet non traité devient une
cause .Une séquelle qui perdure cesse
d’être séquelle .Elle devient entretenue. Notre responsabilité est de combattre
cette
violence faite à des hommes et femmes de ce pays au nom de valeurs
rétrogrades et infectes. Car l’injustice est une violence et elle est porteuse
de violence .Nous nous devons de la combattre au lieu de combattre ceux qui la dénoncent. Et
d’où qu’elles nous viennent les injustices qui structurent notre société sont
intolérables. Nos consciences les répugnent comme anachroniques et non conformes
à l’image de pays démocratique que nous voulons donner de nous-mêmes .Parce
que la démocratie ne saurait se réduire à un simple alignement de libertés. Elle
ne peut et ne doit s’accommoder de pratiques injustes fussent –elles des
vestiges d’un passé récent. La démocratie se fonde sur le droit et le droit ordonne,
oriente mais surtout répare. Il a
vocation de (r)établir des équilibres et de façonner des modèles. Elle ne doit
en aucun cas être une légitimation d’ordres pernicieux. Elle n’est pas
saupoudrage mais refonte en profondeur, restructuration. Celle qui fait sauter
les lignes de démarcation basées uniquement sur des considérations ...épidermiques.
On ne peut s’abriter derrière l’histoire
pour justifier notre inaction. L’on ne peut tout le temps invoquer le
passé pour nous dédouaner de nos errements. C’est trop facile. La gouvernance,
c’est l’art de réparer les torts les nôtres et ceux de nos prédécesseurs. C’est
indécent de passer le temps à leur faire
porter la responsabilité de nos échecs collectifs. Si l’héritage s’impose
comme fatalité c’est qu’il bénéficie de
la complicité des hommes. Si la Mauritanie est toujours inégalitaire ce n’est
certainement plus la faute à l’histoire !
Ainsi l’Etat doit s’adapter à la nouvelle donne, le
gouvernement s’arrimer à cette exigence de la gouvernance politique moderne
car inéluctablement l’on va vers une massification de ces pôles de contestation
et un triomphe certain des idéaux et valeurs dont ils sont porteurs. C’est la
loi de la marche du monde et la sagesse politique commande de comprendre et
accompagner les processus historiques irréversibles.
Oumar S.Deme