dimanche 16 octobre 2011

Abdoul Birane Wane: L'homme qui n’accepte pas qu’on touche à sa nationalité

Encore étudiant au département d’histoire de l’université de Nouakchott, Abdoul Birane Wane trouve que la Mauritanie est un pays multiculturel qui a le plus clair du temps, vécu en paix. Sauf «qu’un sang innocent y a coulé un jour, remettant en question cette paix historique». Encore écolier au primaire, Abdoul a été témoin «de la coulée de ce sang, en 1989, qui a lézardé la cohésion sociale en Mauritanie». C'est à ce moment précis que sa conscience politique émerge, et jure que nul ne pourra contester sa nationalité. Le fils d’un ancien combattant du Vietnam n’hésite pas alors à se lancer dans le champ de bataille, pour faire face à un recensement qu’il considère comme «discriminant» envers la communauté négro-mauritanienne
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Abdoul Wane considère n'avoir pas eu d’autre alternative: «Vu le manque d’écoute des autorités, et le silence des présumés protecteurs des intérêts de cette communauté (les politiciens négro-mauritaniens qui errent dans leurs alliances politiques), nous étions obligé de descendre dans la rue et dire non à ce recensement discriminatoire qui prive une grande partie de nos frères de leur droit à la nationalité dans leur pays natal».

Quant aux autres leaders politiques nationaux, tels que Ibrahima Sarr, Ahmed Ould Daddah et Messaoud ould Boulkheir, Birane Wane est concis: «je ne partage pas leurs méthodes et ils doivent simplement prendre leur retraite». Par contre, Birane applaudit fort l’attitude des partis politiques soutenant les revendications des manifestants; parallèlement, il condamne «la répression irresponsable» de la part des autorités, tout en insistant sur «le pacifisme et la détermination de Touche pas à ma nationalité» et accuse le régime d’être l’unique responsable des «tragédies» qui ont eu lieu.

L'enfant d'Aleg

Wane vit le jour un lundi 17 mai 1976, à Aleg, dans une famille traditionnellement aristocrate, originaire du village Wan Wan, à proximité de Bababé; un village datant de plus de douze siècles, selon Abdoulaye qui affirme son appartenance à une famille véritablement africaine traditionnelle. Le destin conduisit ce natif d’Aleg, loin de sa ville natale, à Rosso et plus précisément au lycée de Rosso, anciennement Coppolani, où il s’initia à la politique en prenant part à certains mouvements et partis politiques. De l’AMN à l’AMJD*, Abdoul resta longtemps fidèle au leader politique Ibrahima Sarr jusqu’à ce que «de profonds différends» provoque sa démission en 2008, et par là-même, sa sortie du monde politique. Âgé de 35 ans et toujours célibataire, Wane perçoit le mariage comme un écueil dans sa lutte contre les pratiques d’un «régime raciste» à l’encontre de la communauté négro-africaine. Orateur doué, Wane ne se dit pas tout simplement «célibataire» mais «célibataire, sans enfants». Avec une touche d’humour, il avance que ceux qui défendent des causes ne se marient, généralement, que tardivement, comme le leader palestinien Yasser Arafat.

Candidat aux dernières législatives, l’homme au déjà long parcours politique a pu, sans peine, mobiliser l’opinion publique pour sa cause, regroupant ainsi autour de lui la quasi-majorité des jeunes négro-mauritaniens. Un entourage qui a trouvé en lui le leader qu’il faut pour assumer les lourdes responsabilités.
Dès les premiers jours de la naissance du mouvement Touche Pas A Ma Nationalité (TPAMN), Wane a su se servir des médias contre les médias officiels, «organes de propagande, plus qu'autre chose».

«Pas raciste, ni téléguidé»

Wane rejette toute les accusations de racisme portées contre lui et contre le TPAMN. Il nie être «raciste» ou être «téléguidé»; Et avec un sourire rusé, il déclare à propos des rumeurs diffusées en masse dans les sites d’informations nationaux et internationaux et qui parlent d’une relation entre lui et le Mossad israélien: «Ceux qui collaborent avec Israël sont connus de tous. Le régime mauritanien a collaboré et collabore toujours avec Israël: Il lui a bâti un hôpital au centre de la capitale. L’uniforme que portent ses policiers est israélienne, les grenades lacrymogènes qu’ils nous balancent, avec générosité, sont aussi israéliennes. Alors, qui est le vrai collaborateur?»

Abdoul ne permet donc à qui que ce soit de remettre en question son patriotisme, et à l’évocation de la forte sympathie des négro-africains envers le Sénégal, dont parlent certains arabo-berbères, Wane s'amuse: «Je ne suis même pas parmi les supporteurs de l’équipe sénégalaise, mon équipe préférée est celle du Brésil, et mon joueur favori n’est pas El Hadj Diouf, ni Henry Camara, mais plutôt le brésilien Rivaldo».

Craignant de mauvaises interprétations, il pèse chacun des mots qu'il prononce. Et niant avoir toute relations politiques, locales ou étrangères, il signale: «Je ne suis jamais allé en France, ni au Sénégal depuis 5 ans. Et je n’ai jamais eu le moindre contact avec le FLAM», tout en faisant remarquer que ce mouvement (FLAM) n’est pas du tout chauvin, «C’est un mouvement qui a regroupé des mauritaniens de toutes les communautés, y compris des arabo-berbères. C’était tout simplement une réaction contre le régime de Taya».

Sans langue de bois, le flegmatique d'Aleg refuse le terme «politique» dans ses engagements actuels. «On veut lever des injustices. Il n'y a rien de politique là-dedans. C'est une question de dignité et de droits». Précisant que ni la gloire, ni la célébrité ne sont dans ses rêves. «Je retournerai cultiver la terre de mes ancêtres, quand le régime d'état mettra un terme aux discriminations».

Baba Ould Hourma - Noor Info

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